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La Révolution tranquille de l’Ontario

Photo : Sylvain Marier, Festival franco-ontarien

Photo : Photo : Sylvain Marier, Festival franco-ontarien

Par

Thomas H.B. Symons

Le patrimoine francophone

Published Date: mai 18, 2012

Le rôle des francophones dans l’édification de l’histoire et la vie de cette province remonte à l’aube du XVIIe siècle, époque à laquelle les explorateurs et les missionnaires se lancent dans des voyages officiels de reconnaissance et de conversion religieuse.

En 1791, date de la fondation du Haut-Canada, les liens entre la communauté francophone et la province sont solidement établis et reconnus dans certaines de ses premières lois. De fait, une résolution reconnaissant les droits des francophones dans le Haut-Canada est adoptée à Newark dès juin 1793.

L’importance de la langue pour la population francophone – et pour l’identité de la province dans son ensemble – est évidente pour tous les acteurs ayant entrepris de créer un cadre éducatif pour la province au cours de la période antérieure à la Confédération. Rappelons ainsi qu’Egerton Ryerson, surintendant principal de l’éducation du Haut-Canada pendant plus de 30 ans, était d’avis que le français, tout comme l’anglais, était l’une des langues reconnues de la province, et que les enfants devaient donc recevoir une éducation dans l’une de ces deux langues au sein des écoles publiques de la province.

Pourtant, entre l’avènement de la Confédération et la propre Révolution tranquille de l’Ontario, qui intervient dans les années 1960 – soit près d’un siècle – les francophones de la province font l’objet de pressions aussi lourdes que réelles, qui visent leur assimilation en partant du principe que celle-ci est souhaitable et possible. Ce parti-pris a profondément influencé la façon de penser de presque chaque gouvernement provincial depuis la Confédération, d’autant qu’il est appuyé par un mouvement plus large qui intervient dans le Canada anglais dans l’objectif de restreindre l’emploi du français, voire de le supprimer de façon pure et simple. Même l’opposition véhémente de Sir John A. Macdonald, qui dénonce ce mouvement à la Chambre des communes en 1890, n’enraye que très peu cette tendance.

Malgré les efforts déployés notamment sur le plan législatif pour empêcher l’emploi de la langue française dans la province, le fait français persiste. Cette réalité transparaît dans les modestes avancées obtenues dans le domaine de l’éducation pendant l’entre-deux-guerres – une tendance qui culmine dans les années 1960 au cours d’une période marquée par des réformes substantielles.

Les années 1960 sont en effet le théâtre de réformes et d’innovations nombreuses et profondes, qui constituent une véritable révolution eu égard à la place des citoyennes et des citoyens francophones de l’Ontario, à leurs droits et aux débouchés qui s’ouvrent à eux, notamment dans la sphère éducative et linguistique.

En 1969, l’adoption de la loi sur l’école en langue française va de pair avec une reconnaissance croissante du rôle joué par la communauté franco-ontarienne dans l’histoire et la vie de la province. Le premier ministre John Robarts salue ce fait et s’en fait l’écho en déclarant que « depuis plus de trois siècles, les hommes et femmes d’origine française jouent un rôle significatif dans le développement de l’Ontario […]. La communauté franco-ontarienne continue de jouer ce rôle aujourd’hui […]. Sa force, sa vitalité, ses accomplissements et son potentiel sont immenses. La présence de ces résidentes et résidents francophones rendent l’Ontario – en réalité, l’ensemble du Canada – bien plus riche et plus fort. » (traduction libre)

Depuis les années 1960, nous avons assisté à d’autres réformes législatives ainsi qu’au renforcement de l’identité franco-ontarienne par le biais de l’éducation à tous les paliers, de la littérature et des arts, et de la création de symboles culturels. Ce renforcement identitaire a amélioré les droits individuels ainsi que les possibilités offertes à l’ensemble des Ontariennes et des Ontariens sur le plan éducatif et culturel.

Aujourd’hui, alors que la deuxième décennie du XXIe siècle vient de s’ouvrir, nous assistons à une évolution continue au sein de l’Ontario francophone. Cette évolution joue un rôle de premier plan dans la transformation du paysage culturel, social et linguistique de la province, avec pour corollaire une communauté plus diverse. Ce changement s’accompagne de possibilités enthousiasmantes et de nouveaux enjeux, qui, dans un cas comme dans l’autre, permettront d’étayer et d’enrichir notre compréhension de l’expérience francophone en Ontario.