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Maintien de la paix : les Quakers et la guerre de 1812 dans le Haut-Canada

Lieu de réunion et cimetière de la Société des amis (Quakers) sur la rue Yonge à Newmarket (Photo : Portes ouvertes à Newmarket)

Photo : Lieu de réunion et cimetière de la Société des amis (Quakers) sur la rue Yonge à Newmarket (Photo : Portes ouvertes à Newmarket)

Par

Robynne Rogers Healey

Le patrimoine militaire

Published Date: févr. 17, 2012

Bien que la guerre de 1812 soit littéralement arrivée jusqu’aux portes des membres de la Société religieuse des amis (Quakers) du Canada, seule une poignée d’entre eux s’est engagée volontairement dans le conflit. Cela ne signifie pas pour autant qu’ils n’ont pas été touchés par la guerre. Bien au contraire, les Quakers ont profondément souffert de leur pacifisme. La position pacifiste de la Société des amis était bien connue du gouvernement du Haut-Canada. En 1792, le lieutenant-gouverneur Simcoe encourage les Quakers à établir une communauté en leur promettant d’être exemptés des devoirs de milice. En 1806, une réunion de Quakers s’adresse officiellement au lieutenantgouverneur Gore, l’assurant de leur engagement à l’égard « du bien-être et de la prospérité de la province » tout en lui rappelant que « notre conscience nous interdit de rejoindre les rangs de bon nombre de nos compagnons mortels […] pour prendre l’épée afin de verser le sang humain ».

Malgré les concessions gouvernementales relatives aux témoignages religieux, les Militia Acts (lois sur la milice) de 1793 et de 1794 ne permettent l’exemption du service militaire qu’à la seule condition que l’on paie une amende à la place. Les Quakers refusent de payer ces amendes, au motif que cela revient à soutenir l’activité militaire. Ceux qui paient les amendes ou engagent un remplaçant pour assumer leur service encourent des mesures disciplinaires et éventuellement un désaveu. Les Quakers s’opposent également à la participation à un appel nominal pour intégrer la milice ou aux exercices militaires, même si aucun combat n’a lieu. Lorsqu’ils refusent de payer les amendes militaires, le gouvernement colonial répond en saisissant leurs propriétés. Entre 1806 et 1812, les Quakers paient ainsi le prix fort en perdant nombre de propriétés et de biens, beaucoup passant même un mois en prison. Si les Quakers de toute la province souffrent au nom de leurs principes, ce sont ceux de la rue Yonge qui sont les plus durement touchés, sans aucun doute en raison de leur proximité avec York, la capitale de l’époque.

La plupart des Quakers restent fidèles à leurs croyances pacifistes lorsque la guerre éclate en 1812, et très peu rejoignent le conflit de leur plein gré. En cas d’appropriation de leurs chevaux ou d’autres biens, les Quakers sont censés supporter cette perte sans mot dire. Dans la mesure où de nombreux fermiers quakers refusent les billets émis par le gouvernement pendant la guerre en échange de céréales ou d’hébergement de soldats, ils perdent non seulement des revenus, mais aussi leur propriété.

Ce témoignage en faveur de la paix est en réalité un plaidoyer contre la guerre. Tout lien avec la guerre ou les activités associées est interdit. À de très rares exceptions, les Quakers se conforment à ces restrictions. Leurs établissements sont encore relativement récents et généralement à l’écart des autres colons. La communauté de la rue Yonge se relève tout juste d’une épidémie qui a fait des ravages en 1809; une deuxième épidémie de nature inconnue balaie la communauté en 1812-1813. En outre, en 1812, David Willson prend la tête d’un groupe qui s’est détaché de la Société des amis de la rue Yonge pour former The Children of Peace. Chez les Quakers, l’heure de la discorde a sonné.

La guerre a eu des conséquences dévastatrices sur les Quakers dans le Haut-Canada, mais elle n’est pas le seul facteur qui est entré en jeu à cette période. Non seulement la guerre a représenté une menace extérieure, mais surtout, elle a mené à des divisions internes et à des ruptures au sein des Quakers.