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Un exemple à suivre

Linda Hoad, bibliothécaire retraitée, fait partie des bénévoles agissant en faveur du patrimoine, forte d’une connaissance encyclopédique de l’histoire de Hintonburg : ses recherches ont fait gagner des heures de travail aux équipes municipales au fil des ans.

Photo : Linda Hoad, bibliothécaire retraitée, fait partie des bénévoles agissant en faveur du patrimoine, forte d’une connaissance encyclopédique de l’histoire de Hintonburg : ses recherches ont fait gagner des heures de travail aux équipes municipales au fil des ans.

Par

Sally Coutts

Les bâtiments et l'architecture, La communauté

Published Date: mai 06, 2010

Les petites et les grandes villes ontariennes désignent des biens aux termes de la Partie IV de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario depuis son entrée en vigueur dans les années 1970. Ce constat soulève inévitablement la question suivante : que reste-t-il à désigner? Après la désignation des églises, écoles et maisons historiques, comment une municipalité peut-elle dénicher les autres édifices pouvant en bénéficier?

Cet élan en faveur d’un renouvellement du regard sur la collectivité vient souvent du public. Il est fréquent que ce soient les résidents d’un quartier qui leur tient à cœur qui aiguillent les bénévoles et les professionnels du patrimoine vers certains joyaux méconnus de leur communauté, entraînant la désignation de ces lieux.

L’ancienne École Sacré Cœur a été convertie en appartements.

C’est certainement ce qui s’est passé dans le quartier de Hintonburg, situé à l’Ouest du centre-ville d’Ottawa. Il s’agit d’un quartier résidentiel traversé par une artère commerciale, la rue Wellington. De caractère diversifié, cette rue accueille de grandes maisons en briques fin de siècle, des habitations ouvrières plus modestes, de vastes églises et beaucoup d’institutions autour du site de l’ancien Hôpital Grace, démoli en 2001. Ces dernières années, l’endroit a connu un engouement croissant, en particulier de la part d’une population attirée par la vie des centres urbains sans avoir les moyens d’habiter dans les autres quartiers du centre d’Ottawa. Ainsi, les biens de cette collectivité ont été remarqués : en 2007, le magazine En Route a distingué Hintonburg parmi les 10 principaux quartiers canadiens qui connaissent une ascension. En outre, The Ottawa Citizen a dit sa « fascination à observer l’évolution du quartier ».

Ces quinze dernières années, Ottawa a désigné quatre bâtiments dans cette zone, dont l’ancienne École Sacré Cœur, à présent reconvertie en appartements, la caserne des pompiers Parkdale, l’école Devonshire et un édifice commercial en pierre. Toutes ces désignations découlent de requêtes déposées par les bénévoles dévoués de l’Association communautaire Hintonburg, dont la connaissance de terrain a aidé les équipes de planification de la conservation du patrimoine à comprendre l’importance de ces bâtiments.

Linda Hoad, bibliothécaire retraitée, fait partie des bénévoles agissant en faveur du patrimoine, forte d’une connaissance encyclopédique de l’histoire de Hintonburg : ses recherches ont fait gagner des heures de travail aux équipes municipales au fil des ans. Récemment, Linda Hoad expliquait que, dès sa création au début des années 1990, l’Association communautaire avait délibérément choisi d’inscrire le patrimoine parmi ses priorités. Les membres sont convaincus que commémorer le patrimoine architectural de Hintonburg peut favoriser l’émergence d’un sentiment d’appartenance et de fierté, et contribuer à dissiper la perception parfois négative du public vis-à-vis du quartier. Le nouveau groupe a donc rapidement commencé à recenser les candidats possibles pour une désignation.

L’Édifice Magee a obtenu la protection du bâtiment aux termes de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario. Aujourd’hui, il abrite un cabinet d’architecture. (Photo : Ville d’Ottawa)

L’Édifice Magee a obtenu la protection du bâtiment aux termes de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario. Aujourd’hui, il abrite un cabinet d’architecture. (Photo : Ville d’Ottawa)

En raison de l’attachement de ses membres à leur quartier, l’Association communautaire est alors toute désignée pour cette mission : les adhérents connaissent parfaitement la zone et savent généralement quand un projet doit être réalisé ou lorsqu’un bâtiment change de propriétaire. Si elle estime qu’un édifice est menacé, l’Association s’y intéresse particulièrement. L’une de ses premières réussites concerne l’Édifice Magee au 1119, rue Wellington. Il s’agit alors d’un ancien magasin dont l’aspect bien plus ancien que les bâtiments qui l’entourent suscite l’attention de l’Association; si bien que lorsqu’il est mis en vente, Linda Hoad se plonge dans les recherches et finit par établir qu’il a été construit au début des années 1880. D’abord habitation privée, l’édifice sert de banque dans les premières années du XXe siècle, époque à laquelle Wellington commence à s’imposer comme l’artère commerciale du quartier. Après des mois d’échanges avec la municipalité, Linda Hoad réussit à obtenir la protection du bâtiment aux termes de la Loi sur le patrimoine de l’Ontario. Aujourd’hui, il s’agit d’un cabinet d’architecture.

Linda Hoad s’est aussi intéressée au patrimoine industriel de Hintonburg. À la fin du XIXe siècle et au début du siècle suivant, l’extrémité nord du quartier, délimitée par les rues Wellington et Scott, est très industrialisée et accueille de nombreux bâtiments du secteur, dont Capital Wire Cloth, la fonderie Beach ainsi qu’une rotonde ferroviaire. Dans les années 1970, Capital Wire cesse ses activités de fabrication tout en conservant une bonne partie de son caractère industriel. La municipalité se penche actuellement sur cet édifice et sur deux autres – la Standard Bread Company, qui héberge aujourd’hui une association d’artistes, et le site de Bayview – afin de statuer quant à leur éventuelle désignation. Le cas échéant, il s’agirait du premier ancien ensemble industriel de la ville à être désigné.

L’Association communautaire Hintonburg n’a cependant pas limité ses priorités à la désignation. En 1993, elle a publié un itinéraire de promenade à succès, et son site Web propose une très riche section consacrée au patrimoine. Tout cela est encore dû au travail d’une équipe de bénévoles dévoués. Ainsi, la prochaine fois que vous vous demandez ce qu’il y a d’intéressant dans votre quartier, adressez-vous donc à vos voisins. Des communautés fières et impliquées peuvent collaborer avec des planificateurs municipaux chargés de la conservation du patrimoine pour préserver les traces de leur histoire architecturale : un exemple à suivre.