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Guerre froide et technologies de communication

L’entrée s’ouvre sur le tunnel anti-souffle, premier contact des visiteurs avec le musée. (Photo : Diefenbunker)

Par

Justin Williams

Le patrimoine militaire, La communication

Date de publication :20 mars 2019

Photo : L’entrée s’ouvre sur le tunnel anti-souffle, premier contact des visiteurs avec le musée. (Photo : Diefenbunker)

Le Diefenbunker, Musée canadien de la Guerre froide, baptisé d’après John Diefenbaker, treizième premier ministre du Canada, est un abri souterrain de 9 290 mètres carrés (100 000 pieds carrés) situé à Carp, en Ontario. Face à l’escalade nucléaire des années 1960, cette merveille d’ingénierie, située à trente minutes du centre-ville d’Ottawa, fut construite pour abriter le quartier général souterrain du gouvernement fédéral du Canada. En cas d’attaque nucléaire, les hauts responsables désignés seraient évacués vers le Diefenbunker, où ils pourraient poursuivre leurs activités et habiter sous terre pendant trente jours. Si le Diefenbunker n’eut heureusement jamais à remplir sa vocation première, le lieu a bien accueilli une station militaire pendant 32 ans, celle de la Station des Forces canadiennes Carp (SFC Carp). Les stations militaires sont de taille plus modeste que les bases militaires, mais la SFC Carp recelait une arme secrète qui en faisait un lieu hautement stratégique : ses technologies de communication.

Le panneau de commande original des studios de Radio-Canada. En cas de catastrophe nucléaire, la station aurait relayé des renseignements à la population civile. (Photo : Diefenbunker)

Le panneau de commande original des studios de Radio-Canada. En cas de catastrophe nucléaire, la station aurait relayé des renseignements à la population civile. (Photo : Diefenbunker)

Afin que le gouvernement puisse poursuivre la gestion des affaires du pays et communiquer avec l’extérieur depuis le souterrain, le bunker, construit entre 1959 et 1961, devait absolument être équipé des dernières technologies. Son emplacement, classé « très secret », devant être dissimulé, il fallait concevoir les technologies de communication en tenant compte de cette donnée. Pour masquer la véritable localisation du Diefenbunker, ce dernier fut relié à cinq bunkers satellites au moyen de 90 kilomètres (55 milles) de fil de cuivre. Ceci permettrait d’éviter que le Diefenbunker soit visé par les bombardements, car les transmissions étaient relayées par les bunkers satellites, d’où les messages semblaient émaner.

Au bunker, vous ferez peut-être partie des rares visiteurs qui reconnaîtront un dispositif popularisé par la Guerre froide : le téléphone à cadran. La communication au sein du bunker ne devait en aucun cas être interrompue. On privilégia donc des téléphones filaires en guise de ligne de sécurité, car les signaux radioélectriques et les signaux des émetteursrécepteurs portatifs (walkies-talkies) étaient susceptibles d’être brouillés, et les téléphones filaires demeureraient opérationnels si Ottawa était bombardée. On mit également en place une ligne directe reliée à la Maison-Blanche qui elle non plus, ne servit jamais. Aujourd’hui encore, les équipes du musée localisent les membres du personnel ou communiquent avec eux grâce aux téléphones filaires.

Au cours de la Guerre froide, les lieux furent équipés de nouveaux dispositifs de communication. Le central semi-automatique Ottawa Semi-Automatic Exchange (OSAX), baptisé salle « très secrète » du superordinateur (Top Secret Super Computer Room), était une gigantesque cage de Faraday à travers laquelle aucun signal, quel qu’il soit, ne pouvait filtrer. Dès 1980, les militaires eurent recours à cette nouvelle technologie de pointe pour assurer le traitement et la communication des