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Savoir-faire en maçonnerie traditionnelle : où est la relève?

Homme effectuant une réparation au mortier exclusif sur la fenêtre patrimoiniale (Photo : Donovan Pauly)

Par

Donovan Pauly

Le patrimoine immatériel

Date de publication :08 sept. 2017

Photo : Homme effectuant une réparation au mortier exclusif sur la fenêtre patrimoiniale (Photo : Donovan Pauly)

Il semble y avoir une importante pénurie de gens de métier qualifiés au Canada. Plusieurs rapports gouvernementaux ont été produits, au fil des ans, pour analyser le déclin des techniques traditionnelles.

La situation est particulièrement inquiétante dans certains milieux de la construction, comme celui de la maçonnerie. Conscient du problème, le gouvernement du Canada cherche activement des ouvriers qualifiés d’autres pays pour combler la pénurie. Des procédures d’immigration accélérées sont introduites pour ceux qui ont des compétences spécialisées, ce qui laisse présager des lacunes dans les formations offertes dans notre société pour répondre aux exigences actuelles et futures en matière de main-d’oeuvre. Le marché du travail au pays ne semble pas valoriser l’apprentissage technique et l’acquisition de compétences; on constate un important mouvement vers les études universitaires, au détriment des métiers. La plupart des étudiants compétents et désireux d’apprendre sont dirigés vers des programmes universitaires. Il en résulte un recul du savoir-faire technique. De fait, les candidats plus talentueux sont découragés et n’optent à peu près plus pour de telles disciplines.

En Ontario, la formation en maçonnerie est offerte dans plusieurs collèges ou dans des programmes financés par les syndicats ou les entrepreneurs, en vue de remplir la portion de classe du modèle d’apprentissage. Un rapide coup d’oeil au domaine traditionnel de la maçonnerie – notamment l’édification et la restauration de structures en pierre sèche – permet de constater que les options diminuent. La plupart des formations en maçonnerie menant à une certification reconnue, comme le Sceau rouge de l’Ontario, sont liées à la technique maçonne de briques et de blocs, surtout pour le placage de maçonnerie moderne et les murs structurels. Les pratiques de maçonnerie traditionnelle et de restauration ne représentent qu’une mince partie de la formation.

Les jeunes travailleurs souhaitant pratiquer un « métier de la truelle » sont habituellement dirigés vers des formations en maçonnerie de briques et de blocs bien établies, qui leur offrent un meilleur salaire, plus rapidement, que s’ils avaient suivi une formation en maçonnerie traditionnelle et de restauration. Des options sont offertes à ceux qui cherchent une formation, entre autres les programmes dans un nombre limité d’établissements comme le Collège Algonquin, à Perth, et le Collège Conestoga, à Waterloo. L’apprentissage de la maçonnerie de restauration est également offert à l’Ontario Masonry Training Centre, mais le candidat doit d’abord terminer une formation en maçonnerie de briques et pierres certifiée par le Sceau rouge.

Homme effectuant une réparation au mortier exclusif sur la pierre (Photo : Donovan Pauly)

Dans d’autres régions, particulièrement dans le nordouest de l’Europe, les métiers s’avèrent une bonne option pour les jeunes étudiants qui veulent jeter les bases d’une carrière enrichissante. Ainsi, en Allemagne, les candidats en architecture et en génie sont encouragés à suivre une formation dans un métier de la construction avant de poursuivre au niveau professionnel supérieur.

Pour ressourcer l’industrie de la restauration, bien des entrepreneurs doivent recruter des talents à l’extérieur de la province et du pays. Autrefois, pour répondre à la demande, le recrutement se faisait principalement en Europe, surtout dans les pays plus au sud ou à l’est, comme l’Italie, le Portugal, la Pologne et l’ancienne Union soviétique. Récemment, le Royaume-Uni et l’Irlande fournissaient également de la main-d’oeuvre, car leur industrie de la construction s’est affaiblie après la crise financière et la récession de 2008.

Les domaines de la maçonnerie et de la restauration connaissent un faible essor chez les femmes. En effet, moins de 1 p. 100 des femmes travaillent en maçonnerie et dans les métiers connexes, comparativement à une moyenne de 48 p. 100 pour les autres emplois (Canadian Job Market Report de 2014). De plus, il reste difficile d’attirer les minorités visibles et les nouveaux Canadiens dans l’industrie.

Les travailleurs en maçonnerie de restauration sont généralement âgés; un large éventail d’aptitudes et d’outils sont nécessaires vu la nature du travail. Un compagnon doit détenir des compétences de base à la truelle pour concevoir et construire des unités de pierres, de blocs ou de briques, ainsi que des connaissances spécialisées pour le ragréage, la reformation de joints, l’injection de coulis, la réparation de fissures, le nettoyage et les autres tâches de réparation et de restauration. Une maîtrise des techniques de construction et des matériaux connexes – les mastics, revêtements, métaux architecturaux et matériaux de couverture – interagissant avec la maçonnerie est aussi un atout.

Le travail peut être gratifiant, mais il faut être dévoué. Les travailleurs les plus prolifiques démontrent souvent une soif d’apprendre, des habiletés manuelles et une solide éthique de travail. Ce qui touche seulement une poignée de travailleurs, avouons-le.