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Une histoire de la communication – Faire communauté, améliorer la compréhension, façonner la société

Bureau de poste de Kenora

Photo : Bureau de poste de Kenora, conçu par Thomas Fuller, architecte en chef du ministère fédéral des Travaux publics.

Par

Beth Hanna

La communauté, La communication

Published Date: mars 20, 2019

Les êtres humains ont toujours cherché à communiquer entre eux – à échanger des histoires, des expériences, des idées, des réflexions. À faire communauté. À échanger des renseignements entre eux et avec les générations futures, en jetant des ponts entre les personnes et les cultures, le temps et l’espace. Au cours de l’année à venir, la Fiducie s’intéressera au thème de la communication en examinant comment la langue orale et écrite, la préservation des langues, l’innovation technologique, les systèmes de communication et les échanges interculturels ont influencé le patrimoine culturel de l’Ontario.

Avant l’apparition de l’écriture, les gens exprimaient leurs idées sous forme de pétroglyphes et de pictogrammes. On en trouve plusieurs exemples en Ontario, notamment dans le parc provincial Petroglyphs, sur le rocher Agawa dans le parc provincial du Lac-Supérieur, sur le site de Pimachiowin Aki et à l’embouchure de la rivière Nipigon. Ils nous rappellent nos ancêtres qui nous ont précédés sur cette terre; ils sont l’expression de traditions anciennes, d’enseignements sacrés et de visions différentes du monde. Les communautés autochtones connaissent leur existence depuis des générations. La préservation de ces sites est une responsabilité commune qui requiert notre attention, et qui fait l’objet d’un autre article.

La langue est un élément central de la gouvernance, de la législation, des échanges et du commerce – mais aussi de la culture. J’ai déjà écrit des articles sur la préservation des langues dans d’autres numéros de cette revue. Dans le Recensement de la population de 2011, Statistique Canada fait état de plus de 200 « langues parlées à la maison ». La langue est indispensable parce qu’elle permet de transmettre l’histoire, de conter des récits, de distinguer les visions du monde et de partager des valeurs. Le rôle essentiel de la langue pour perpétuer la tradition et l’identité culturelle a été mis en lumière par les travaux de la Commission de vérité et réconciliation, selon lesquels un grand nombre des quelque 90 langues autochtones qui ont survécu au Canada sont en grand danger de disparition. Les Nations Unies ont proclamé 2019 comme l’Année internationale des langues autochtones « afin de sensibiliser le public à celles-ci [et à] leur importante contribution à la riche diversité culturelle de notre monde ».

"Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit."
– Nations Unies, Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948

Au départ, en Ontario, les renseignements s’échangeaient par lettre, par télégramme et dans les journaux, et le transport des messages et des colis s’effectuait à cheval, en diligence et sur rail, puis par voie aérienne. La mise en place d’un service postal a permis d’offrir au public un système de communication, et les bureaux de poste sont devenus des bâtiments remarquables et des lieux de rassemblement communautaires importants.

La communication ne se limite pas à la langue écrite. Nous avons mis à profit notre créativité et notre sens de l’innovation pour trouver des moyens d’enregistrer et de partager des idées, de « télé »communiquer – d’abolir les distances pour entretenir des relations à travers tout l’Ontario et au-delà, le long des cours d’eau, des routes, des voies de chemin de fer et des canaux numériques. Les Ontariennes et Ontariens ont largement contribué aux technologies de communication utilisées à l’ère moderne.

Dans une entrevue datant de 2002, le linguiste, historien et philosophe américain Noam Chomsky faisait la comparaison suivante : « Les avancées majeures en termes de vitesse des communications et de capacité d’interaction ont eu lieu il y a plus d’un siècle. Le passage du transport du courrier par voilier au télégraphe a été beaucoup plus radical que celui du téléphone au courriel! » [Traduction]

Le télégraphe électrique a permis d’accélérer les communications, en transmettant des messages codés sur de longues distances. Le 19 décembre 1846, pour la première fois au Canada, la Toronto, Hamilton and Niagara Electro-Magnetic Telegraph Company transmettait un télégramme, envoyé par le maire de Toronto à son homologue de Hamilton. Les compagnies de télégraphe ont joué un rôle important pour faire le lien entre les particuliers, les entreprises et les agences de nouvelles. La Commission des lieux et monuments historiques du Canada a érigé une plaque commémorant cet événement historique national.

"Au Canada, les journaux sont la littérature du quotidien ... Un journal canadien est un curieux mélange de politique, de religion, d’injures et de renseignements généraux. Il contient, sous une forme condensée, toutes les nouvelles de l’ancien et du nouveau monde, et il informe ses lecteurs des événements se déroulant sur notre grande planète, du pôle Nord aux mines d’or d’Australie et de Californie."
– Susanna Moodie, Mark Hurdlestone, 1853

Jadis, au XVIIIe et au XIXe siècle, les cartes de visite constituaient un outil de communication et de promotion sociale. La pratique consistant à laisser une carte personnalisée au domicile d’une personne à qui vous souhaitiez rendre visite relevait d’une étiquette complexe. Cette carte de visite et ce porte-cartes appartenaient à Marianne Brown (1786- 1862). Photo : Collection de la maison George Brown.

Le 26 juillet 1874, Alexander Graham Bell inventa le téléphone dans sa maison familiale de Brantford. Deux ans plus tard, il réussit à effectuer le premier appel téléphonique « interurbain » au monde, entre Brantford et Paris, en Ontario. Cette histoire fascinante – et les conflits connexes relatifs au brevet – est retracée dans le détail par différents auteurs, ainsi qu’au lieu historique national du Canada de la Maison-Familiale-Rurale-de-Bell. Même s’il lui était impossible, de son vivant, d’appréhender pleinement l’impact que son invention aurait sur la société, Bell prédisait en 1878 qu’un jour ou l’autre « deux personnes, séparées par des centaines de milles, pourront se parler en se voyant » [traduction].

Les visiteurs de l’Exposition nationale canadienne ont pu découvrir pour la première fois la radio, en 1922, et la télévision, en 1939. La Loi du radiotélégraphe de 1913 conférait au gouvernement fédéral le pouvoir d’attribuer des licences à des stations de radiodiffusion et de facturer des frais s’élevant à 1 $ pour chaque appareil récepteur. La première licence a été attribuée en 1919, à Montréal, et on comptait plus de 60 stations en activité dès 1928. La popularité de la radio s’est renforcée suite à l’invention, en 1925, de la radio sans pile Rogers, par Edward S. Rogers père, dit « Ted », un ingénieur radio torontois qui conçut la première radio pouvant utiliser le courant alternatif (CA) provenant du système électrique d’une habitation plutôt que de piles.

Des stations de radio privées diffusaient des nouvelles communautaires, des bulletins météo locaux et des divertissements. Créée en 1936, la Commission canadienne de la radiodiffusion (CCR)/Radio-Canada s’est efforcée d’étendre la couverture radiophonique et d’accroître les services aux quatre coins du pays. En décembre 1951, Conrad Lavigne a lancé la première station de radio francophone en Ontario, CFCLTimmins, dont la programmation mettait en avant la fierté culturelle, l’amour de la langue française et l’importance des écoles francophones. À la fin de l’année 2008, on comptait plus de 1 200 stations de radio/ services audio au Canada, dont 60 p. 100 étaient privés.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a été formé en 1976 pour s’assurer que le système constitué des stations et des réseaux de radio et de télévision est « possédé et contrôlé effectivement par des Canadiens de façon à sauvegarder, enrichir et raffermir la structure culturelle, politique, sociale et économique du Canada », que la programmation est « de haute qualité [et qu’elle utilise] principalement des ressources canadiennes créatrices et autres ».

CFMT, dont le siège se trouve à Toronto, a été la première station de télévision multiculturelle et multilingue lancée au Canada, en 1979. Rogers Communications racheta la station en 1986 et obtint une licence en 2002 pour lancer CJMT afin de diversifier sa programmation multiculturelle. En 2002, les deux stations devinrent OMNI Television, qui diffuse aujourd’hui des programmes ethnoculturels dans plus de 40 langues. En 1991, le CRTC attribua une licence à Television Northern Canada, qui commença un an plus tard à diffuser des programmes dans tout le Nord du pays. Créé en 1999, APTN est le premier réseau national de télévision des peuples autochtones à l’échelle mondiale. Sa programmation est élaborée par et pour les Autochtones.

En 1996, plus de 120 ans après l’invention de Bell, Research in Motion (RIM), une entreprise établie à Waterloo, lança son premier Inter@ctive Pager 900, un téléavertisseur permettant de dialoguer, d’envoyer des télécopies, de se connecter à Internet et de communiquer par courriel. Mis en vente trois ans plus tard, le BlackBerry® 950 faisait fonction de téléavertisseur, de dispositif de communication par courriel et d’agenda électronique.

Le renforcement du programme spatial et de la technologie des satellites a eu un impact considérable sur nos systèmes de communication. Le Canada a joué un rôle de chef de file dans le développement des communications par satellite. Dans la société moderne, bon nombre de nos interactions reposent sur la technologie des satellites : regarder les nouvelles ou une partie de baseball à la télévision, publier des photos sur Instagram ou utiliser des cartes bancaires. Cette technologie permet également de fournir des services, comme le téléapprentissage et la télémédecine, dans les collectivités éloignées.

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Photo Credit: Random

Anik A series communications satellite

Anik A series communications satellite. In the 1970s, the Anik satellites provided improved coverage of Canadian televisions signals especially to the far north. Photo: San Diego Air & Space Museum

Créé en 1969, Télésat Canada a lancé son premier satellite, Anik A1, en novembre 1972, faisant du Canada le premier pays à utiliser des satellites géostationnaires pour ses communications nationales. Les satellites sont devenus des outils essentiels pour relier les collectivités. Selon l’Agence spatiale canadienne : « Les satellites de télécommunication constituent le moyen le plus économique de relier les collectivités canadiennes, même celles des régions les plus isolées, aux services de pointe requis pour soutenir la concurrence dans l’économie mondiale du savoir. »

La collection du Musée des sciences et de la technologie du Canada comprend le satellite Hermes, fabriqué par Spar Aerospace , à Toronto, en 1976. Utilisé jusqu’en novembre 1979, ce satellite a permis de mener plusieurs expérimentations dans le domaine des communications, afin de fournir des services médicaux (la « télémédecine ») et éducatifs (le « téléapprentissage ») dans les régions éloignées, de promouvoir l’interaction communautaire, de fournir des services gouvernementaux et d’offrir la télévision directe à domicile.

En 2004, Télésat Canada lança Anik F2, qui offrait pour la première fois aux ménages canadiens une connectivité bidirectionnelle à large bande. En 2014, le Canada était le deuxième marché le plus important au monde dans le secteur des services à large bande par satellite. Cette technologie permet d’offrir des services de télésanté, par exemple des vidéoconférences grâce auxquelles les fournisseurs de soins de santé, en particulier dans les régions éloignées, peuvent obtenir les conseils de spécialistes et se perfectionner. Il existe aussi désormais des applications de télémédecine, comme les systèmes de téléchirurgie.

Depuis le papier et la plume jusqu’aux machines à écrire, depuis les ordinateurs jusqu’aux messages textes, aux courriels, à FaceTime et à Skype, les êtres humains ont créé des technologies de plus en plus complexes pour renforcer leurs communications. Aujourd’hui, nous échangeons nos réflexions sous forme abrégée, sur Twitter et Instagram ou au moyen de ces dessins simplifiés que sont les émojis. Désormais, plus personne ne sort sans son téléphone intelligent ou sa tablette. Nous utilisons des balados et YouTube à des fins d’apprentissage; nous nous servons de tablettes et de liseuses électroniques pour lire des journaux et des livres; nous disposons d’un choix pléthorique de chaînes de télévision et de services de diffusion en continu/sur demande, comme Crave, Netflix et Amazon, pour visionner des programmes sur des écrans qui sont devenus à la fois de plus en plus grands et de plus en plus petits. Il existe des applications de clavardage, de communication et de messagerie. Nous avons incontestablement amélioré notre capacité de télécommuniquer, d’échanger des idées à distance. Cela signifie-t-il pour autant que nous communiquons plus efficacement? Je vous laisse réfléchir à la question.

Que nous réserve l’avenir en matière de communication? Jules Verne serait ravi du nombre de laboratoires de recherche qui consacrent actuellement leurs travaux à la technologie des hologrammes. Je suis sûre qu’il y aura une application pour ça, aussi.

"Les modes d’interaction humaine ont évolué sous l’effet de la connectivité des dispositifs de télécommunication en ligne, notamment des applications mobiles, des médias sociaux et des gigantesques moteurs de recherche qui sont devenus les outils quotidiens de personnes de tous horizons."
– Douglas Coupland, présentation de l’exposition "I Was Raised on the Internet", 2018